Crèche liégeoise

A la demande d'un musée de Maastricht, j'ai accepté de prêter ma crèche liégeoise. Certains la connaissent déjà, autant que tout le monde en profite.

Je l'ai créée il y a 21 ans. Les santons habillés d'étoffes anciennes font 30 cm. Ce sont tous personnages qui s'inspirent du folklore liégeois. Les bâtiments sont des maisons traditionnelles du XVIIIe s. qui alternent, pierre appelée petit granit et briques. Les constructions existent réellement et je les ai réunies pour former une portion de rue. J'ai triché sur la hauteur des bâtiments, le plus haut fait déjà 1m10 de haut. Il suffit de réduire les étages de manière à créer une perspective. Les tuiles à torchettes, à double courbe sont faites une
à une , cuites une première fois, badigeonnées à l'oxyde de cuivre et recuites. C'était mon père qui passait son temps à me les faire.


On peut voir de gauche à droite :

le pêcheur, Marcatchou, il est mort en 1896. La grande tragédienne, Sarah Bernhardt, avait eu l'idée saugrenue de pêcher et se retrouva en compagnie de Marcatchou qui aimablement lui offrit des asticots qu'il gardait en bouche...La tragédienne en jeta sa canne à la Meuse. Il était capable de pêcher du poisson n'importe où et entrait dans le fleuve quand il était poursuivi par les gendarmes.
A la veille de l'hiver, il se présentait à la prison et purgeait au chaud toutes les petites condamnations accumulées pendant l'année. Il arbore fièrement un saumon, témoignage d'un temps où on en pêchait encore dans la Meuse. Il reste célèbre à Liège.

Le meunier vêtu de blanc et couvert de poussière de farine.

Le Berger avec sa palette qui jetait de la terre dans la direction des brebis qui s'éloignaient.


La dame âgée qui serre son châle est mon arrière-grand-mère morte à 97 ans. Elle porte un bonhomme en couque de Dinant. La couque était offerte aux enfants à la saint-Nicolas, fêtée le 6 décembre, c'était lui qui leur apportait les cadeaux.. Il vaut mieux avoir des dents solides (pas pour toi Chicouloun) ou une tasse de café pour les tremper.




Il y a la cotiresse, maraîchère avec sa jupe de moutonne rouge rayée noire autour du cou pour avoir de l'aissance pour porter plus facilement le panier sur la tête. L'anecdote avait fait beaucoup rire Marie Mauron. Plus tard, j'ai déposé une petite cotiresse sur sa tombe. Cela complétait les santons que René Pesante a déposé dans son cercueil.

La femme au berceau avec un berceau d'osier tressé tel qu'on en trouvait dans les classes populaires et enfin la botteresse, hotteuse, messagère qui acheminait les marchandises, fortes femmes au parler fleuri, un peu nos poissonnières à nous...Ce sont elles qui ont transporté la terre pour ériger la butte de Waterloo.




Le ravi est à côté de la Nativité. Je vous ai expliqué ailleurs qu'il figure déjà en 1620 dans l'imagerie anversoise. Le personnage le plus connu de la crèche provençale est d'origine belge.

Il y a aussi le marchand de moutarde.Je me suis inspiré d'une enseigne de magasin en tôle du XIXe s.



Il y a aussi tous les petits présents qui sont disposés devant le berceau: cruche de lait, panier d'oeufs, bac de maquées (fromages blancs frais dont l'eau s'écoulait au moyen d'une baguette loin de la marchande), sabots minuscules, jambon,...Bref tout un petit monde très différent et pourtant si proche de la crèche provençale.

Photos et commentaires Michel.

Une crèche Liégeoise ? Je ne connaissais que le café liégeois
Néanmoins, magnifique réalisation, merci Michel de nous la faire partager.

Pour qu'on y voit un peu mieux, voici la boterresse et mon arrière grand-mère en grande conversation.



Photo MArAm-Liège.et commentaire Michel

On ne sait où donner de la tête, entre photos et commentaires. Magnifique !

J'aime beaucoup les siamoises que tu as employées pour les jupes. Il est trés difficile d'en trouver de nos jours pour restaurer des santons.

Je connais en effet cette crèche mais je ne m'en lasse pas, elle a toute sa place dans ce forum, merci Michel.

b]Le ravi [/b]est à côté de la Nativité. Je vous ai expliqué ailleurs qu'il figure déjà en 1620 dans l'imagerie anversoise. Le personnage le plus connu de la crèche provençale est d'origine belge.

J'admire le travail c'est fantastique.Sans vouloir froisser personne je crois que comme pour la bière
chaque pays a créer son ravi,à une date plus ou moins proche,dans ses crèches ou dans ses contes et légendes,nous trouvons toujours un Naif ou un emerveillé,sans remonter aux Pharaons comme pour la bière.

Il y a beaucoup à dire. Certes, le ravi fait peut-être partie d'un fonds commun, mais je reste persuadé que l'ouvrage que je mentionne est à l'origine de son iconographie. Anvers est à l'époque un des centres de diffusion de la propagande de la Contre-réforme. Les successeurs de Plantin et Moretus inondent le monde catholique. Le livre connaît un succès incroyable et une dizaine d'éditions dans les années qui suivent sa parution en latin, il est déjà traduit la même année en allemand, en 1623 en français et est encore réédité au XVIIIe s. J'ai trouvé une vingtaine de tableaux en France dont J. Michelin et Ph. de Champaigne sur lesquels il figure. On le trouve également dans d'autres écoles , mais il me faut du temps pour passer le tout au crible de la critique historique et réaliser une publication sérieuse. Donc encore un peu de patience. Ceci dit Papet, moi aussi j'apprécie vraiment beaucoup ton travail!

Un régal pour les yeux et en plus avec les explications,c'est super.Merci